Lettre pour l’année qui vient

Ce texte a été écrit en 1997 par Richard Wurmbrabd

Voici le Nouvel-An ! Le moment de régler nos comptes et de décider délibérément d’être de son côté! “ Par la grâce de Dieu je ne veux plus juger les autres ”. C’est une décision qui compte au seuil de la nouvelle année.

St.-Jean Climacus écrivait: “Ecoutez-moi, écoutez, vous calculateurs malveillants qui vous occupez des comptes des hommes! Si c’est vrai (et cela l’est) que vous jugez du jugement dont vous serez jugés, les péchés spirituels ou physiques dont nous accusons notre prochain provoqueront notre chute. C’est certain.”

En prison, j’ai eu le privilège de vivre des années en compagnie de criminels et des bourreaux. Quand je leur parlais de l’Evangile, plusieurs furent convaincus de péché. Mais même après avoir rencontré Jésus comme celui qui pardonne, il leur restait un sentiment amer concernant les méfaits dont ils avaient été les auteurs. Je les questionnais au sujet de leur enfance et de leur jeunesse. Presque pour chacun d'eux, les premières années avaient causé un tel traumatisme que la méchanceté avait pris racine en eux.

Les Français utilisent un proverbe: “Comprendre tout le monde, c’est pardonner à tout le monde”. Nous avons des raisons suffisantes pour ne pas juger, mais plutôt de pardonner même au plus grand des pécheurs. Ma femme et moi avons tous deux été emprisonnés sous les régimes fasciste et communiste. Une grande partie de notre famille a été victime de l’holocauste et, comme je l’ai déjà indiqué précédemment, un des meurtriers impliqués s’est converti à Jésus-Christ dans notre foyer; c’est maintenant un frère en Christ. Les martyrs ont pardonné à leurs bourreaux et à leurs suppôts. C’est ce que nous devrions faire à notre tour. Au début d’une nouvelle année, accordons une amnistie générale à tous ceux qui nous ont blessés, en commençant par nos parents, nos enfants, notre épouse et tous ceux qui, selon notre appréciation, ont péché contre nous. Au lieu de gaspiller notre temps et nos énergies à nous quereller, cherchons à faire du bien autour de nous. Jésus allait de lieu en lieu en faisant du bien. Souvenons-nous que les gens inquiets provoquent l’inquiétude. Prenons la décision de témoigner de l’amour d’une manière pratique envers ceux qui souffrent autour de nous.

Alors que nous jetons un regard rétrospectif sur les événements de l’année écoulée, nous constatons que le mal a poursuivi son oeuvre autour de nous et dans le monde. J'aimerais toutefois relever un aspect positif: on trouve encore dans ce monde beaucoup de bonté et de beauté, qui nous rappellent que Dieu est bon et miséricordieux. Puissions-nous lui consacrer nos vies comme tout à nouveau.

Qui se tient derrière les bombes?

Pendant quatre ans, en Bosnie, des bombes ont explosé tandis que les politiciens continuent à se disputer et à marchander. C’est un holocauste qui se poursuit, comme ce fut le cas sous Hitler et Staline. Depuis 1992, 250’000 Bosniens ont été tués et plus de la moitié de la population a fui le pays. Forcés de fuir vers nulle part, des dizaines de milliers ont péri dans des camps. En une année, 20’000 femmes furent violées; à Sarajevo uniquement, 1500 enfants ont été tués et 15’000 blessés.

Ce n'est qu'une image prise en flash au sujet de ce qui se passe, mais il faut se souvenir que les terroristes ont fait couler le sang innocent impitoyablement dans de nombreux pays. Beaucoup ne sont même pas conscients de leurs actes. Comme Jésus le disait: “Ils ne savent pas ce qu’ils font”. Les grands leaders terroristes sont des disciples de Serge Netchaiev, grand théoricien d’une des plus grandes plaies mondiales et auteur du Catéchisme du révolutionnaire. (Gef- est-ce bien la traduction du titre???) Il mourut en 1882 dans une prison russe.

Il croyait que la fin justifiait les moyens et enseignait que le terroriste doit tout détruire sur son passage, sans faire de choix:

“Toutes les idées sur le futur sont criminelles, car elles empêchent la destruction pure et simple. Tous les moyens de conflit sont utiles. Toute récidive d’une organisation terroriste conduit à la mort.

Le révolutionnaire est un condamné. Il ne connaît ni propres intérêts, ni propres sentiments, il ne possède rien en propre. Tout en lui est gouverné par un sentiment exclusif, une passion : la révolution.

En rompant tout lien avec l’ordre social et la morale de ce monde, il vit dans la société dans le seul but de la détruire. Il méprise tout ; tout n’est que doctrine et science sans valeur. La seule science qu’il connaît, c’est la révolution. Son seul but : la destruction de ce monde horrible.

Il méprise l’opinion publique et la morale. Pour lui, uniquement ce qui conduit à la victoire de la révolution est moral. Ce qui l’en empêche est immoral et criminel. Entre lui et la société, c’est une guerre à mort qui s’est engagée.

Tous les sentiments familiaux, l’amitié, l’amour, la gratitude et l’honnêteté sont condamnés à disparaître. Le seul but est la destruction.

La nature du révolutionnaire authentique exclut tout romantisme, sentimentalisme, etc.”

C’est au fond le caractère de tout terroriste, peu importe la cause qu’il défend, même s’il n’a jamais entendu parler de Netchaiev (Lénine, le fondateur du communisme russe, lui portait une grande admiration).

C’est le devoir de la police d’arrêter de tels terroristes. C’est le devoir du chrétien de conduire ces disciples de la haine à Jésus qui les aime. A notre connaissance, aucune autre organisation que la nôtre ne poursuit ce but.

C’est dans cet esprit - et conscients du risque que nous prenons - que nous avons publié en plusieurs langues la brochure Jésus et les terroristes qui est dès maintenant disponible en français aussi. Aidez-nous à le faire connaître. Ne fuyez pas devant des terroristes mais plutôt, poussés par l’amour, cherchez-les et donnez-leur le baume bienfaisant de l’Evangile. Soutenez notre entreprise périlleuse...c’est Dieu qui l’a suscitée.

Le but de notre existence

Lorsque libérés, ma femme et moi avons pu passer à l’Ouest, nous avons découvert que la majorité des hauts responsables des mouvements évangéliques avaient été aveuglés par les leaders de l’église officielle des pays communistes; ces derniers avaient cédé aux pressions des dictateurs. Ils prétendaient qu’une liberté totale régnait, alors que de nombreux chrétiens languissaient en prison et que d’autres tels que Vanya Moiseev et Nikolas Khmara avaient été brutalement assassinés.

A l’Ouest, le principal canal de désinformation sur la liberté dans les pays communistes a été le Conseil Mondial des Eglises (ces derniers temps le dit mouvement est un peu tombé dans l'oubli). (Gef - à mon avis on devrait supprimer cette phrase trop accusatrice). Nous avons mené un dur combat pour la cause de l’église persécutée. Cette église existe toujours et nous nous efforçons de renseigner nos lecteurs régulièrement à son sujet.

Où règnent encore les adeptes de Netchaiev

Pendant trois décennies j’ai pioché dans les biographies de ceux qui ont passé par les prisons communistes. Nulle part les conditions n’étaient aussi désastreuses que dans la prison de Piteshti (Roumanie). Dans ce lieu indescriptible, les chrétiens étaient soumis à la rééducation communiste; au début, ils étaient confiés à Sile Constantinescu, personnage qui avait été condamné à la prison à vie pour avoir tué son père et sa mère. Par la suite, le responsable fut Eugen Tzurcanu, un prisonnier qui avait été condamné pour n’avoir pas dénoncé certains fascistes qu’il connaissait. Sur l’ordre du directeur de la prison, lui et quelques autres avaient été chargés de rééduquer les chrétiens et les prisonniers politiques. Cette éducation se faisait non au moyen de la littérature, mais par le fouet et la matraque, ainsi que d’autres instruments de torture. Il est beaucoup plus facile de convaincre par ces moyens-là que par des arguments.

Si un prisonnier désirait prendre un peu de repos, on l’en empêchait; ceux qui étaient près de lui étaient serrés à la gorge par les mains de Tzurcanu qui s’amusait à frapper violemment leur tête sur le sol en ciment. Les cris des victimes étaient la seule musique sinistre que l’on pouvait entendre à l’intérieur de ces murs.

On nous servait de la soupe brûlante à même le sol; chaque prisonnier devait s’étendre devant l’écuelle et laper le liquide bouillant comme un chien, sans avoir recours à ses mains. La langue et les lèvres des prisonniers se blessaient. Les personnes chargées de la rééducation se mettaient à rire. Elles persistaient dans leurs efforts jusqu’à ce que le chrétien renie le Christ et se fasse communiste...et bourreau! Sherban Gheorghe se suicida; il fut suivi par d’autres. Pour eux, s’enlever la vie était un péché moindre que renier le Christ et tomber aux mains des communistes du type Netchaiev. Quelques prisonniers - peu nombreux - résistèrent à toutes les ignominies et affirmèrent leur foi malgré les pires douleurs. Ils moururent en martyrs. Ils font partie de cette “grande nuée de témoins” qui nous environnent (Hébr. 12:1).

Les faits retracés ci-dessus sont l’oeuvre des adeptes de Netchaiev. C’est une des tâches de notre mission de conduire les pires mécréants au Christ. L’un d’entre eux avait été condamné à mort par le Gouvernement roumain communiste, qui, dans le passé, avait sanctionné ses actions. J’avais été enfermé dans la même cellule que lui; ayant gagné sa sympathie, j'ai pu recueillir sa confession.

Nous sommes aussi des témoins pour les terroristes d’aujourd’hui. On en trouve beaucoup en Chine, au Vietnam, au Laos et dans les pays musulmans, principalement au Soudan. Dans ce pays, on alla même jusqu’à crucifier des enfants de chrétiens âgés de six ans.

Une nouvelle année commence. Joignez-vous à notre combat contre le mal insidieux qui se cache et se manifeste parfois parmi des membres de nos familles possédés par le démon.

Le Nouvel-An n’est pas un jour réservé aux beuveries, mais un temps de prise de décisions nouvelles dans notre combat contre “les dominations, les autorités, les princes de ce monde de ténèbres, contre les esprits méchants dans les lieux célestes (Eph. 6 :12)”. Soyez à nos côtés, comme nous sommes aux côtés du Christ dans ce combat.

En ce début d'année, ma prière est que Dieu "nous fasse tous asseoir dans les lieux célestes en Jésus-Christ" qui est la lumière (Eph. 2:6).

Avec vous au service du Christ,

Richard Wurmbrand